Studnia
« La vodka fait beaucoup de mal aux nourrissons. »
Le texte Le puits qui compte seulement trois pages, a d’abord été publié dans le journal Kurier Poranny (Courrier du matin) à Varsovie, en 1935. Il a été repris seulement en 1973, après la mort de Witold Gombrowicz, dans le volume Varia, édité par l’Institut littéraire « Kultura » de Paris.
Brève satire sur la paternité bourgeoise qui mène à l’infanticide, Le puits décline le thème du « vierge-à-l’enfant ».
Le nom du héros, « Bikle », rappelle la pâtisserie la plus fameuse de Varsovie : le café Blikle, que Witold Gombrowicz a probablement choisi comme un clin d’oeil à la mièvrerie ambiante qui entourait en son temps la venue au monde d’un bébé, l’incompatibilité du nourrisson avec le monde bourgois snob et sa conception de l’enfant le tenant à l’écart des occupations viriles.
Il n’y a aucun puits dans le texte. Nous pouvons voir dans le titre une allusion à l’infanticide que les mères filles de la campagne auraient eu l’habitude de commettre, selon des lieux communs de l’époque, en se débarrassant de leurs nourrissons en les jetant dans un puits.
Extrait :
― Il m’est venu au monde un enfant.
― Ha, ha, ha ! s’esclaffèrent les jeunes filles, il a mis au monde un enfant ! Il a mis au monde un enfant !
― C’est mensonge ! hurla-t-il, ce n’est pas moi qui ai mis au monde, c’est ma femme qui a mis au monde !
― Ha, ha, ha ! rugirent les jeunes filles, sa femme a mis au monde un enfant !
― Taisez-vous ! gronda-t-il, ce n’est pas ma femme qui a mis au monde, c’est l’enfant qui lui est venu au monde !
― Ha, ha, ha ! les jeunes filles se roulaient par terre, un enfant est venu au monde à sa femme ! Bikle-à-l’enfant, ha, ha, ha, Bikle-à-l’enfant ! et, de rire, elles éclatèrent toutes comme un seul homme.