Brak tłumaczenia
Mots clés : gueule, cucul, immaturité, forme
Gueule et cucul
Je ne connais rien de plus affreux qu’un être humain à qui un autre être humain a fabriqué une gueule. Tout est bon au second pour renforcer le premier dans le ridicule, la mascarade, le grotesque, car la laideur accrue de l’un nourrit la beauté de l’autre. Croyez-moi : le cucul qu’on peut fabriquer à un autrui n’est rien en comparaison de la gueule !
Ferdydurke |
« Faire une gueule » à un homme, c’est l’affubler d’un autre visage que le sien, le déformer. Quand, par exemple, je traite un homme qui n’est pas bête comme un imbécile ou que je prête à un homme bon des intentions criminelles, je leur « fais une gueule ».
Et la « cuculisation » est un procédé à vrai dire similaire, à cette différence près qu’il consiste à traiter un adulte comme un enfant, à l’infantiliser. Souvenirs de Pologne |
La déformation qui s’opère entre les hommes n’est pas la seule, ne serait-ce que parce que l’homme, dans son essence la plus profonde, possède quelque chose que je dénommerais volontiers l’« impératif de la Forme ». Un quelque chose qui est, me semble-t-il, indispensable à toute création organique. Par exemple, le besoin inné que nous avons de développer la Forme toujours inaboutie : chaque forme amorcée exige un complément, quand je dis A, quelque chose m’oblige à dire B, et ainsi de suite. Cette nécessité de développer, de compléter, en vertu d’une certaine logique inhérente à la Forme, joue un grand rôle dans mes œuvres.
Testament. Entretien avec Dominique de Roux |
“Ferdydurke” s’aventure sur d’autres terrains, moins foulés : le mot « forme » s’y associe au mot « immaturité ». Comment décrire cet homme ferdydurkien ? Créé par la forme, il est créé de l’extérieur, autant dire inauthentique, déformé. Etre un homme, cela veut dire ne jamais être soi-même. […]
L’immaturité n’est pas toujours innée ou imposée par les autres. Il existe aussi une immaturité vers laquelle nous fait basculer la culture lorsqu’elle nous submerge, lorsque nous ne réussissons pas à nous hisser à sa hauteur. Nous sommes infantilisés par toute forme « supérieure ». L’homme, tourmenté par son masque, se fabriquera à son propre usage et en cachette une sorte de sous-culture : un monde construit avec les déchets du monde supérieur de la culture, domaine de la camelote, des mythes impubères, des passions inavouées… domaine secondaire, de compensation. Préface à l’édition française de La Pornographie, 1960 |