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Constantin « Kot » Jeleński

Brak tłumaczenia


Costantin dit « Kot » Jelenski (1922-1987) 


Issu d’une famille de la noblesse terrienne, fils de diplomate, Constantin Jelenski, né à Varsovie en 1922, est mort à Paris le 4 mai 1987. Il a fait ses études en Pologne qu’il a quittée en 1939 pour rejoindre l’armée polonaise en France. Après des études au collège Saint Andrews en Ecosse, il a travaillé à la F.A.O., à Rome, de 1948 à 1951. Jelenski s’est ensuite installé à Paris où il a fait partie, de 1952 à 1973, du secrétariat du Congrès pour la liberté de la culture et de la rédaction de la revue Preuves. Depuis 1976, Jelenski était chargé de mission à l’Intitut national de l’audiovisuel à Paris.


Constantin Jelenski a largement contribué à faire connaître la littérature polonaise en Occident et, en tout premier lieu, celle de Witold Gombrowicz. Depuis la publication de Trans-Atlantique, en 1952, dans la revue de l’émigration polonaise Kultura de Paris (dont il fut, depuis le début, un proche collaborateur), Jelenski n’a cessé par ses traductions, par ses écrits, par ses démarches dans les milieux intellectuels, de promouvoir l’œuvre de Gombrowicz qui a écrit : « Chaque édition de mes livres en langues étrangères devrait porter le sceau "grâce à Jelenski ».
Jelenski était le traducteur, le double de Gombrowicz ; il était aussi l’initié et l’un des derniers témoins de ce monde gombrowiczien d’avant-guerre à jamais disparu.

Witold Gombrowicz et Kot Jelenski, Vence, 1967. Photo : Bohdan Paczowski.


Constantin Jelenski a écrit de nombreux textes sur Gombrowicz que l’on peut trouver dans les recueils de ses essais publiés en polonais : Zbiegi Okolicznosci (Concours de circonstances, éd. l’Institut littéraire) et Chwile oderwane (Instants détachés, éd. slowo/obraz terytoria).
Il est coauteur, avec François Bondy, d’un essai en langue allemande sur le théâtre de Gombrowicz.
Il a dirigé, avec Dominique de Roux, le Cahier de l’Herne consacré à Gombrowicz.
Il a traduit, avec Geneviève Serreau, trois œuvres de Gombrowicz : deux drames (Yvonne, Princesse de Bourgogne, Opérette) et un roman (Trans-Atlantique).
Après la mort de Gombrowicz, Jelenski a préparé l’édition des versions inachevées d’Opérette et les a préfacées, intitulant l’ensemble L’Histoire (Opérette).


Constantin Jelenski est aussi l’auteur d’une Anthologie de la poésie polonaise (Ed. du Seuil, 1965), d’une monographie sur Leonor Fini et sur le peintre polonais Jan Lebenstein.



Gombrowicz sur Jelenski : 

« Jelenski - qui est-il ? II s’est levé à mon horizon, là-bas, bien loin, à Paris, et le voilà en train de lutter pour moi. II y a longtemps - jamais peut-être - que je n’ai connu une confirmation aussi décidée, aussi désintéressée de ce que je suis, de ce que j’écris. La seule faculté de se pénétrer d’autrui, de l’appréhender, ne saurait y pourvoir - non, une telle harmonie ne peut naître que fondée sur l’affinité des natures.
Jelenski me défend pied à pied face à l’Émigration polonaise. Il met en œuvre pour me pousser tous les atouts que lui offre la situation qu’il s’est forgée à Paris et son prestige croissant dans la haute société intellectuelle. Il court les éditeurs avec mes manuscrits. Il a déjà su me conquérir une poignée de partisans, et non des moindres. Considération, accord, et même admiration, jusque-là en définitive - « Homo sum » -je comprends... Mais faire pour moi tout ce travail ? Que l’admiration ne se borne pas à admirer ? [...]
II m’arrive souvent d’associer Jelenski (qui paraît-il est un mondain policé, raffiné) à une image apparemment lointaine : celle de la simplicité prolétarienne du soldat. Oui, il m’apparaît que sa facilité est exactement celle qu’on a face au combat, face à la mort, tels des soldats dans la tranchée, nous sommes tous les deux à la fois futiles et tragiques. »
Journal, 1956

 



Jelenski sur Gombrowicz : 

« Aucun portrait de moi ne m’a jamais fait autant plaisir. C’est sans doute du narcissisme de ma part. Chacun a une image de soi-même, peut-être fausse, mais en tout cas je déteste celle du soi-disant mondain policé. J’ai eu une éducation mondaine, il m’en reste des réflexes, mais je ne crois pas du tout être un mondain. En revanche, j’accepte l’image de la simplicité prolétarienne du soldat. [...] Alors que la plupart de mes amis ont cru à ce snobisme gauchiste, Witold a très bien senti que j’étais fasciné par une image prolétarienne mais, comme lui, pour des raisons psychologiques. Il a parfaitement compris ces deux aspects de ma personnalité. Pourtant, il ne me connaissait pas à l’époque et cela m’a paru extrêmement perspicace. C’était sans doute le résultat de son intuition mais aussi de la lecture de mes textes. Il connaissait certains de mes jugements. On s’exprime quand même dans ses écrits.
Mon admiration ne se bornait pas à admirer parce que son œuvre ne se bornait pas à me donner un plaisir esthétique. Ce que j’ai fait pour lui, je l’ai fait en premier lieu pour moi-même, parce que j’avais rencontré quelqu’un qui était proche de ma propre nature. Cela partait d’un intérêt vrai, réel. Il est très difficile de continuer à s’intéresser aux autres quand on vieillit, parce qu’ils nous présentent souvent la énième version de la même situation. Ce qui retient l’attention c’est l’inconfondable ; ce sont les gens qui ont de la force de caractère, qui ne peuvent pas être autres qu’ils sont. Et Witold ne le pouvait pas. Et puis, j’ai toujours eu très peur de m’ennuyer. Quand quelque chose m’apporte de la vitalité en plus, quand je peux jouer avec, eh bien, je saute dessus, c’est normal. Witold m’a apporté énormément de plaisir, d’intérêt, d’éclaircissement sur moi-même et sur le monde. Il était comme une projection de moi-même en plus réussi, en mieux dessiné, en plus parfait et, en même temps, en beaucoup plus malheureux. Mais je savais aussi que c’était le prix de cette réussite. »
Témoignage de Constantin Jelenski dans le livre de Rita Gombrowicz Gombrowicz en Europe (1963-1969), éd. Denoël, Paris, 1988